Non, le président Kim Jong Un n’a pas mis en garde les États-Unis contre toute action militaire contre l’Iran !

Cette vidéo faisant croire que le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-Un, a mis en garde les Etats-Unis contre toute action militaire contre la République Islamique d’Iran est hors contexte. Sur la vidéo de 25 secondes publiée le 20 juin sur la page Facebook “Développement de la Guinée”, nous apercevons le dirigeant nord-coréen faire une allocation présentée comme étant traduite en français.

La légende de la vidéo fait croire à une prise de position de Kim Jong Un dans le conflit entre l’Iran et Israël tout en mettant en garde les Etats-Unis contre toute implication dans cette guerre qui oppose ces deux pays du Moyen-Orient. « Kim Jong-Un (…) met en garde les États-Unis contre toute action militaire contre l’Iran qui conduira inévitablement à l’effacement d’Israël sur la terre et mettra ainsi fin aux civilisations. L’Honorable Kim Jong-Un demande à Trump de réfléchir mille fois avant de prendre toute décision et de savoir que l’existence de son pays (États-Unis) dépend des décisions qu’il aura à prendre dans un avenir proche (…) » assure l’auteur de la publication.

Après vérification, nous sommes en mesure d’affirmer que cette vidéo a été sortie de son contexte et n’a aucun lien avec les évènements en cours au Moyen-Orient.

Voici comment nous avons procédé à notre vérification

Pour vérifier l’authenticité de cette vidéo, nous avons fait plusieurs captures d’écrans. Cette technique nous a permis d’effectuer une recherche inversée d’images et d’occurrences. Pour mieux comprendre le contexte de la vidéo, les différentes captures d’écrans ont été traduites via Google Lens. Dans l’analyse, nous nous sommes rendu compte que le sous-titrage de la vidéo est en chinois.

La traduction du chinois vers le français montre que le 1er janvier 2018 est bien la date à laquelle Kim Jong Un a prononcé son discours. Cela est d’ailleurs mentionné au-dessus de la bande du sous-titrage. Et en haut de l’écran, à droite, nous remarquons le logo de TVBS [News], une chaîne d’information continue basée à Taïwan. Les images insérées dans la vidéo montrent des missiles probablement lors d’un défilé militaire. La vidéo d’une durée de 25 secondes est bien issue d’une allocation du président nord-coréen. Mais il ne s’agit pas d’un discours récent.

Capture d’écran de son allocution en 2018 traduite par ©GuineeCheck

D’autres sources prouvent que cette vidéo existe sur internet depuis 2018…

À travers la recherche inversée d’images, nous avons retrouvé la même vidéo datant d’il y a 7 ans (soit en 2018). C’est le cas de cette vidéo du média américain la VOA (Voix de l’Amérique), publiée par Team2Faso sur Facebook, dans ce reportage de France Télévision publié sur Dailymotion ou encore sur la chaîne YouTube de l’Agence France Presse (AFP).

Contexte de la vidéo

La vidéo qui circule est en réalité une allocation du président nord-coréen, en 2018, à l’occasion de la traditionnelle adresse à la nation à l’occasion du nouvel an. « Le bouton nucléaire est toujours sur mon bureau. Les États-Unis doivent prendre conscience que ce n’est pas du chantage, mais la réalité », avait-il déclaré à cette occasion. Plusieurs articles de médias français comme Le Figaro, France 24 ou ce reportage de BFM TV le confirment.

Tensions Iran-Israël, une escalade aux conséquences inquiétantes

Cette fausse vidéo attribuée au leader de la Corée du Nord, Kim Jong Un, est sortie de son contexte alors que l’Iran et Israël sont en guerre depuis le 12 juin. Le régime de Benyamin Netanyahou a bombardé plusieurs villes iraniennes tuant des hauts responsables militaires et des scientifiques nucléaires iraniens. Une guerre qui suscite de vives réactions au-delà de la région. Elle vient de connaître une escalade majeure après l’entrée en guerre des Etats-Unis aux côtés d’Israël avec le bombardement dans la nuit du 21 au 22 juin de trois sites nucléaires iraniens.

En outre, les hostilités continuent entre l’Iran et l’Israel qui se battent à coups de missiles, de drones, de cyberattaques.

La détestation entre les deux pays ne date pas d’aujourd’hui. C’est en 1979, à la suite de la révolution islamique, que l’Iran a décidé de la rupture de ses relations diplomatiques avec Israël, dirigé par le « régime sioniste” que Téhéran considère comme un « illégitime », menant un génocide contre les Palestiniens. Israël, de son côté, voit dans le programme nucléaire iranien “une menace existentielle”. Ces dernières années, les deux puissances se sont affrontées indirectement, notamment en Syrie, au Liban (via le Hezbollah), au Yémen (via les rebelles Houthis) ou encore à travers plusieurs cyberattaques mutuelles.

Le 13 juin 2024, quand l’aviation Israël a mené une série de frappes dans plusieurs régions iraniennes, l’une des conséquences a été l’assassinat du chef des Gardiens de la révolution Hossein Salami et de plusieurs hauts gradés de l’armé. Le lendemain, la République islamique a lancé plusieurs missiles en direction de l’État hébreu. C’est le début d’une spirale de représailles qui continuent encore d’endeuiller les deux parties (plus de 650 morts en Iran et au moins 24 morts en Israël) et de faire des dégâts matériels considérables. Cette situation fait craindre un embrasement régional, d’autant que les Etats-Unis de Donald Trump viennent de faire leur entrée dans cette guerre à l’issue incertaine.

Verdict

La vidéo prétendant montrer le président nord-coréen mettre en garde les Etats-Unis contre une implication dans la guerre est hors contexte. La séquence qui circule sur les réseaux sociaux est certes réelle mais elle date de 2018. La vidéo est plutôt issue de l’allocation à la Nation de Kim Jong Un à l’occasion du nouvel an en 2018. À l’époque, Kim Jong Un avait proféré des menaces contre les États-Unis en vantant les progrès dans l’armement nucléaire de son pays, mais il n’était question d’un conflit entre l’Iran et l’Israël.

Cet article a été rédigé par Mamadou Ciré Barry dans le cadre du Projet endiguer les désordres de l’information au Sahel, avec le soutien de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Il a été édité par Thierno Ciré Diallo et approuvé par Sally Bilaly Sow.

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